Bourha, Kolofata, Fotokol et Mora inaugurent les premiers centres de négoce.

Ces groupements d’intérêt public visent entre autres le renforcement de la décentralisation et l’optimisation des recettes douanières dans ces zones frontalières avec le Nigeria.

Dans un contexte de porosité des frontières, de résurgence et d’accroissement de la fraude et de la contrebande sous l’effet de l’insécurité occasionnée par les méfaits de la secte islamiste Boko Haram dans la région septentrionale, la direction générale des Douane a conclu un protocole d’accord avec les communes de Bourha, Kolofata, Fotokol et Mora, département du Mayo Sava, région de l’Extrême-Nord. Outre ces premiers éléments de contexte, il y a que le pays souffre également de tensions géopolitiques qui impactent négativement le commerce extérieur, de la montée galopante de l’inflation, du déficit des pôles de développement aux zones frontalières, de la prise en charge difficile des marchandises dans les postes de douane ou encore, de la modicité des moyens logistiques de surveillance des zones frontalières et du rayon couvert par l’administration douanière.

Toutes ces contraintes handicapent les communes et les caisses de l’Etat des recettes auxquelles elles sont droit de s’attendre. À titre d’illustration, le bureau de douanes de Limani dans la commune de Mora, a réalisé en 2023, des recettes de l’ordre de 01 milliards de FCfa. Une performance qui se situe en deçà des attentes réelles de ce poste qui, en temps de paix, permettait de réaliser des chiffres impressionnants dans cette zone où le commerce illicite dicte sa loi. Du coup, pour renverser la tendance, et émanciper les CTD de la dépendance aux ressources budgétaires notamment les centimes additionnels communaux, accentuer leur autonomisation et permettre une création de ressources internes en réduisant la fraude et la contrebande, la direction générale des Douanes a signé un protocole d’accord avec ces quatre mairies le 17 janvier 2024 à Limani.

Ce protocole qui engage les deux parties à une collaboration franche et mutuellement bénéfique, est un véritable outil de consolidation de la facilitation  et de la simplification des procédures. Il signe également la confiance entre les différents opérateurs grâce à la mise en place d’un centre de négoce, point unique d’entrée des marchandises dans l’hinterland. «Les Centres de Négoces, faut-il  le rappeler, sont des points uniques d’entrée de marchandises dans les localités frontalières de l’hinterland, des magasins ou aires de dédouanement aménagés dans le cadre d’un partenariat entre l’Administration des Douanes et les Communes intéressées. Ils ont pour but de lutter contre la fraude et la contrebande par la mise en œuvre des moyens propres à permettre l’organisation, la sécurisation, la facilitation et la régulation des opérations du commerce extérieur dans les localités frontalières », explique le ministre des Finances, Louis Paul Motaze.

À travers ce protocole d’accord, les différents acteurs, notamment la DGD et les mairies de Fotokol, Bourha, Mora et Kolofata, mettent en place un cadre d’accompagnement réciproque et mutuellement bénéfique en vue de l’atteinte de leurs objectifs respectifs. Plus spécifiquement, il va s’agir de lutter contre la fraude et la contrebande, mutualiser les efforts et les actions de lutte contre le commerce illicite et frauduleux, renforcer l’autonomie financière et les capacité d’investissements des communes grâce à l’augmentation de leurs ressources propres, améliorer la prise en charge des marchandises aux frontières, réduire les délais de passage des marchandises, et échanger les renseignements sur les circuits d’exportation et d’importation des marchandises.

Pour ce faire, les communes s’engagent à construire et aménager des centres de négoce, des magasins ou des aires de dédouanement aménagées. Elles doivent également mettre à la disposition de la DGD, toutes les conventions signées avec les partenaires étrangers dans le cadre des importations issues de donations et autres investissements directs, dans le droit fil de la coopération décentralisée avec l’étranger. De plus, assurer la transmission des informations et du renseignement par toutes les voies possibles sur les circuits de fraude, de contrebande et de contrefaçon aussi bien à l’importation qu’à l’exportation.

Elles doivent aussi prêter main forte aux agents des Douanes lorsqu’ils en font expressément la demande, lors des interpellations, poursuites à vue, recherches et identification des marchandises de fraude et de contrebande, ainsi que de leurs auteurs et complices.

Les engagements des communes portent également sur l’appui dans les opérations de conduite en douane à travers la prise en charge des marchandises qui entrent dans ces différents centres de négoces, points uniques d’entrée, entrepôts publics et autres magasins de dédouanement extérieur ; la sécurité et la surveillance des marchandises à l’intérieur et aux alentours de ces aires de dédouanement et amener les populations à collaborer dans la lutte contre le commerce illicite entre autres.

Pour ce qui est de la DGD, elle s’engage à accompagner les communes dans leurs opérations et activités liées au commerce extérieur ; organiser des sessions de formation en direction des communes sur la fiscalité douanière ; aménager des couloirs rapides de dédouanement des marchandises dans le cadre de la Coopération décentralisée avec l’étranger ; octroyer des facilités aux marchandises importées dans le cadre des dons étrangers faits directement aux communes ; les accompagner dans la construction, l’aménagement et l’équipement des centres de négoces, des points uniques d’entrée, des marchés frontaliers et autres entrepôts ; et enfin, la DGD entend intéresser financièrement les communes de Mora, Bourha, Kolofata et Fotokol sur la base d’une allocation en lien avec l’amélioration de la prise en charge des marchandises et la collecte des recettes qui leur sont dues suivant la loi.

À ce propos, le ministre se montrera plus explicite. « Les communes ayant aménagé les centres de négoces bénéficient, en guise d’appui à l’investissement réalisé, d’une allocation financière annuelle calculée sur la base des recettes budgétaires réalisées par les bureaux des douanes installés sur le territoire desdites communes », motive le ministre des Finances.

Par la construction des centres de négoce et la signature de ces protocoles d’accord, l’on devrait assister au recul de l’enclavement, à une création d’emplois ainsi qu’à une réduction de la pauvreté dans ces communes en plus de l’optimisation escomptée des recettes douanières et municipales. «Grâce à ce protocole d’accord portant sur la construction du centre de négoce, les recettes de ce bureau de Limai vont tripler d’ici là », assure Ibrahim Mimche, de la direction générale des douanes.

Pour mémoire, les centres de négoce ont été consacrés dans la Loi N° 2010/015 du 21 décembre 2010 portant Loi de Finances de la République du Cameroun pour l’exercice 2011. Ils sont mis en application  dans le décret N° 2014/2946 du 12 septembre 2014 portant création, organisation et fonctionnement des Centres de Négoces dans les zones frontalières.

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